1400 ca.
CHRISTINE DE PIZAN, Epistre d’Othea, Cap. 22
Edizione critica a cura di Parussa G., Genève 1999
Texte
Ne t’assottes pas de l'image
Pymalÿon, se tu es sage,
Car de tele ymage paree
Est la beauté trop comparee.
Glose
Pymalion fu un moult soubtil ouvrier de faire ymages, et dit une fable que, pour la grant vilté que il vid es femmes de Cydonie, il les desprisa et dist que il feroit un ymage ou il n'aroit que redire. Un ymage de femme tailla de souveraine beauté; quant il l'eut parfaicte, Amours, qui soubtilment scet cuers ravir, le fist estre amoureux de son ymage, et pour lui fu agrigé des maulx d'amours. Plains et clamours a piteux souspirs lui faisoit, mais l 'ymage qui fu de pierre ne l'entendoit. Au tempIe Venus s'en ala Pymalion et tant lui fist devote clamour que la deesse en ot pitié et, en demonstrance de ce, le brandon que elle tenoit a par lui s'esprist et aluma. Adont pour le signe fu joyeux l' amant et vers son ymage s' en vait et entre ses bras le prent et tant l' eschauffa a sa char nue que l'ymage ot vie et a parler se prist, et ainsi ot Pymalion joye recouvree. A ceste fable peuent estre mises plusieurs exposicions et semblablement aux autres teles fables, et pour ce les firent les poetes que les entendemens des hommes s' aguisassent et soubtillassent a y trouver diverses exposicions. Si peut estre entendu que Pimalion desprisa la vilté des femmes folieuses et se enamoura d'une pucelle de tres grant beauté, la quelle ne vouloit ou ne pouoit entendre ses piteux plains, ne que se de pierre fust. L'ymage avoit faite, c'est ce que par penser a ses belles beautez s'estoit enamourez. En la parfin tant la pria et tant se tint pres que la pucelle l'ama a sa voulenté et l' eut a mariage. Et ainsi ot l' image, dur comme pierre, vie recouvree par la deesse Venus. Si veult dire que le bon chevalier ne doit estre assotez de si fait ymage en telle maniere que il en lait a suivre le mestier d'armes, au quel il est obligez par l'ordre de chevalerie. Et a ce propos dist Apthalin: «lmpartinent chose est a prince soy assotter de chose qui fait a reprendre».
Allegorie
L'ymage Pymalion, dont le bon chevalier ne se doit assotter, prendrons le peché de luxure dont l'esperit chevalereux doit garder son corps. De luxure dit saint Jerome en un epistre: «O feu d'enfer, de qui la buche est gloutonnie, la flamme c'est orgueil, les flameches sont corrompues paroles, la fumee c'est mauvaise renommee, la cendre c'est povreté et la fin c'est le tourment d'enfer! ». A ce propos dit saint Pierre l' appostre: «Voluptatem existimantes delicias, coiquinacionis et macule deliciis affluentes conviviis suis luxuriantes». Secunde Petri, secundo capitulo.